lundi 21 septembre 2009

L'honneur du lièvre



L’honneur du lièvre

Un lièvre, aussi peureux que nous l’apprend l’usage,
était la risée de tout son entourage…
Sa compagne lassée de son poseur de mines
le gourmandait souvent : « Tu n’es qu’un has-been
quand je veux le panache d’un lièvre conquérant
se jouant des tracas, fierté de ses enfants,
un lièvre qui, de plus, me soit de ces amants
qui porte mon plaisir au-delà de l’instant… »
L’animal, accablé par tant de plaidoirie
fleurant bon le tourment des viles tromperies
n’était qu’oreilles basses et cernes prononcées ;
sa cousine d’Hazebruck dégrisa ses pensées :
« la gent féminine a besoin de rêver
de rire, d’admirer et d’être désirée.
Offre-lui un bouquet de belles fleurs des prés,
trouve un coin d’herbes folles, emmène-là dîner
chante-lui ton amour sur un air de garenne
ose un poème osé dont elle serait la reine… »
Notre lièvre s’en fut, soudain revigoré,
en lisière des bois où poussent les bleuets.
Il aperçut alors de ces fusils luisants
qui suivaient, menaçants, de gros chiens aboyant ;
Il détala, frondeur, au nez de ces derniers,
sautant, zigzaguant, jusqu’à les éloigner
des sites où reposaient familles et congénères…
On le tua, bien sûr, pour que l’homme soit fier.
Sa veuve dépérit de n’avoir pas compris
que mâle mieux compris jamais n’eût dépéri
Moralité :
La gent féminine est parfois compliquée
qui pleure ce qui fut sans aimer ce qui est.


Alain Prunier.